Les toiles mystérieuses
– Mille millions de mille sabords ! Où se trouve ce scrogneugneu de musée ? – D’après mon pendule, un peu plus à gauche, capitaine ! – A gauche ? Mais… ce sont ces cornichons des Dupondt ! Que faites-vous ici ? – On songe à changer d’air. Il paraît que le musée Magritte a besoin de deux gardiens et que nous ferions parfaitement l’affaire. – Je dirais même plus. Il paraît que Magritte a besoin de deux musées et que… – Sacrés bougres d’emplâtres sur une jambe de bois ! Magritte, c’était à Bruxelles la semaine dernière. Cette semaine, c’est le musée Hergé ! – Regardez, capitaine, derrière ce bosquet d’arbres, ce magnifique vaisseau blanc au milieu de cette épouvantable tempête médiatique ! – Une tempête, cette jolie petite brise ? Mais non, moussaillon. Un simple coup de tabac. Oh ! Alerte ! Aux abris ! Voilà Séraphin Lampion ! Trop tard, mille sabords ! – Tu tombes bien, vieux flibustier ! Je suis certain que tu connais les propriétaires de cette baraque. Dis-leur la chance qu’ils ont. Lampion est prêt à assurer tout leur bazar aux petits oignons. – C’est que… – Taratata ! C’est comme si c’était déjà signé. – Vous ne nous accompagnez pas pour la visite ? – C’est pas que je sois contre un peu de culture de temps en temps, galopin, mais franchement, dans la journée, je préfère un bon demi. – Regardez, professeur, dans le hall, cette grande colonne qui rappelle votre fusée. – Mon musée ? – Repeinte en noir et blanc, quelle allure ! J’espère qu’elle portera chance à Frank Dewinne. – Et là, cette passerelle qui serpente dans le ciel, elle est encore plus belle et plus folle que celle de l’Observatoire du professeur Calys. – Sur le mur, moussaillon, les images des aventures où vous vous seriez épargné bien des plaies et des bosses si Hergé avait eu l’idée de me faire apparaître plus tôt ! – Et là, celles où je me suis trouvé dans des situations inextricables à cause de vous. – Votre chien a l’air de grommeler, moussaillon ? – Grommeler ? Alors que personne ne rappelle que, sans moi, vous ne seriez pas tous ici à vous admirer avec un air béat ! – Je suppose qu’il a trouvé un os à ronger. – Et moi, une bouteille de Loch Lomond ! Il serait peut-être prudent que je vérifie si ce whisky est d’origine. Avec le nombre de contrefaçons qui circulent aujourd’hui… – Que faites-vous capitaine ? – Laissez boire un vrai spécialiste. Ah ! Dites donc, il a l’air authentique. Allez, encore une petite gorgée pour être sûr de ne pas me tromper. Mon Dieu, la Castafiore ! – Aaaaaaah ! Je ris de me voir si belle et si amusée !